Ueno Park de Antoine Dole
Ce que je vois dans le miroir à présent, c'est celle qui dort au fond de moi quand les autres me veulent autre. Celle que je suis vraiment. Je me vois. Moi. (SORA) |
Ueno Park de Antoine Dole
Ce que je vois dans le miroir à présent, c'est celle qui dort au fond de moi quand les autres me veulent autre. Celle que je suis vraiment. Je me vois. Moi. (SORA) |
Ueno Park de Antoine Dole
Grand-père avait raison: c'est tout l'arbre qu'il faut regarder. Chaque fleur est une réponse à l'autre. Un grand tout qui redessine le paysage et le transforme. Ce changement, c'est une force que l'on porte en nous. Cette histoire que la nature nous récite depuis des siècles est un rendez vous pour ne pas que l'on oublie. Elle nous raconte, dans son langage végétal, que tout pourrait être différent. Que chaque instant est une opportunité à saisir. Un sourire à donner. Une porte à franchir. Un ceur à explorer. Une vérité à dire. Un avenir à vivre. Il s'agit juste de s’ouvrir. D'éclore. Accepter d'être, parmi ces milliers de fleurs semblables en tout, à la fois unique et singulière, libre. Et le reste, c'est cet arbre immense qui le porte. Le poids de nos espoirs comme de nos doutes, de nos rêves et de nos combats. Rien de tout cela n'est vain. Ce n'est ni un début, ni une fin. Chaque parole que l'on prononce est un recommencement. Et notre vie, un cadeau éphémère que cet univers a à saisir, pour peu qu'on la lui offre. (AYUMI) + Leer más |
Ueno Park de Antoine Dole
J’étais cette petite fille parfaite, qui sourit, qui ne dit rien, même quand le dedans a mal. Des contorsions, toujours. Ne jamais être un obstacle. Dire oui. Obéir. Faire ce qu’on attendait de moi. Ne pas être une difficulté. Mais pour chaque sourire, j’avais une larme. Pour chaque victoire, une défaite. J’étais cette petite fille parfaite, oui, mais prête à m’effondrer. J’ai consacré toute mon énergie à tenter de faire tenir debout mes morceaux et mes fracas. Jusqu’à m’enterrer avec eux, dans le noir, pour que personne ne les voie. J’avais honte de moi, honte de m’être perdue sur un chemin si simple. J’étais en colère contre tous ceux qui n’avaient rien fait pour m’en empêcher. Et maintenant quoi? Que faire de tout ça? (AYUMI) |
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Des familles. Des amis. Des curieux qui se rejoignent. J'observe ce mouvement, la façon dont les corps se cherchent et se complètent. Derrière la rigidité de leurs échanges, une chaleur singulière les lie. Il faudrait que je sois capable de cela à nouveau, pour que mon cœur se lance à la poursuite d'autres émotions, qu'il ressente la beauté de cette communion. Et cette vie, est-ce qu'elle m'appelle? (…) J’aimerais encore être comme cette petite fille qui joue à quelques mètres de là. L’âme affamée de rêves et d’envies. (…) Tout semble être source d’émerveillement sur son visage. (AYUMI) |
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Mais ce que j’ai appris, c’est que cette vie nous transforme. Si l’on ne fait pas attention, elle met dans notre tête des pensées qui ne sont pas les nôtres. Oui, cette vie a tôt fait de nous changer, de nous éloigner, de nous transporter loin de nos vérités. Il faut se battre, pour exister, être soi, s’accomplir. (AYUMI) |
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Les murs qui nous séparent nous vont bien. Ils expliquent nos distances, notre gêne à nous tenir les uns près des autres. Les murs sont devenus des repères pour chacun de nous avec trop de facilité à mon goût. Finalement, j’ai peut-être passé un long moment de ma vie seule dans cette chambre, mais mes parents, eux, sans le savoir, sont restés enfermés de l’autre côté. (AYUMI) |
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Dehors, c’était Hanami. Ce moment de l’année où l’impossible se passe, et où des fleurs roses poussent sur des arbres à l’écorce noire. Celui où la nature se réinvente. Alors j’ai su que je viendrais ici. À l’endroit de mes souvenirs tendres. À l’endroit où quelque chose de moi semblait exister encore. Venir ici, pour me retrouver. Pour renaître. Pour éclore. (AYUMI) |
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J’ai regardé mon visage dans un petit miroir. Mes traits bouffis, ma peau devenue grisâtre. Quand j’ai ouvert la bouche, j’ai été surprise par le propre son de ma voix. On peut devenir étranger à soi-même. Sans s'en rendre compte. D'abord le lien avec les autres et puis ce lien à soi. Alors j'ai su que si ça continuait, j'allais disparaître moi aussi. M’effriter, m'effacer. Voilà comment naissent les fantômes. Un jour, ce qui nous amarre à cette terre et à ceux qui l'habitent se désagrège, sans prévenir, et sans qu'on puisse se débattre, sans qu'on ait le temps de réagir, on n'est déjà plus là. J'ai senti que cette bulle, tout autour de moi, serait la dernière chose à éclater, bien après que tout ce qui a pu exister d'autre aurait disparu. Je ne voulais pas ça. Cette solitude devait prendre fin. (AYUMI) |
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Mais hier soir, j’ai retrouvé une fleur de cerisier séchée, entre les pages d’un cahier. Je l’avais déposée là, après la mort de grand-père, comme on tente naïvement de capturer un moment, juste un peu. Mais je n’avais dérobé que la fleur, rien du reste. Le temps ne se laisse pas berner. Ses couleurs étaient devenues ternes et jaunies. Ses pistils s’étaient décomposés. Il ne restait de ses jolis pétales qu’une pellicule sèche. Rien de doux, rien de vivant. Rien de mon grand-père. Les souvenirs, c’est tout ce qu’il reste de nous quand la vie file sans nous laisser le temps de la serrer contre soi, plus fort. La fleur de cerisier s’est effritée entre mes doigts. J’avais beau la manipuler doucement, elle n’a pas résisté à ce retour parmi les vivants. J’ai pleuré. Pour la première fois. J’ai ressenti quelque chose. Je voulais taper les murs. Les frapper de toutes mes forces. Je voulais hurler. Mais je suis restée là. (AYUMI) |
Ueno Park de Antoine Dole
Maman n’a demandé qu’une seule fois ce que je pouvais bien faire dans ma chambre à longueur de journée. Qu’est-ce qu’elle imaginait?J’aurais voulu lui mentir, trouver quelque chose de bien à lui dire, pour la réconforter. Mais je n’ai pas su transformer la réalité. Je ne fais rien. Je reste allongée, mon ordinateur portable sur les genoux. Je passe mes journées à me balader sur internet jusqu'à ce que mes yeux se ferment. Je relis les mêmes livres. Je ne pense à rien. Ni à ce que je vais devenir, ni à ce qu'il faudrait faire pour que ça change. La vérité, maman, c'est qu'il n'y a rien derrière tout ça. Rien de spectaculaire. C'est une nuit qui ne touche pas à sa fin. Un sommeil dont je ne me réveille pas. Un mot sur le bout de la langue, impossible à prononcer. Une sensation avec laquelle je me débats, et qui me garde prisonnière. (AYUMI) |
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Je sais la peine que je lui cause. Je l’entends parfois pleurer, de l’autre côté de la porte. Mais je n’avais, au fond de moi, plus aucun moyen de les rejoindre. Pour dire quoi? Nous ne racontons pas nos blessures, nous sommes de ces familles qui survivent dans le silence des choses. (AYUMI) |
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Je cherche en moi une voix. (...) Mais rien ne vient qu’un flot de pensées tristes (…). Pendant plus de deux ans, j’ai vécu dans ce silence. Même pas un murmure. Je suis tombée du monde. Et rien, absolument rien, n’a cessé de le faire tourner pour autant. Je n’étais pas cette fille utile, nécessaire, que je pensais être jusque-là. Pas celle que le monde attendait. Une fille de plus. Pas une exception. Une déception. Pour moi, Pour ma famille. Pour tous ceux qui à présent ne prononcent plus mon nom qu’à voix basse. Comment se racheter après ça? Comment se pardonner? (AYUMI) |
Ueno Park de Antoine Dole
Je n’ai pas prié depuis si longtemps, je ne sais pas si les dieux peuvent encore m'entendre ou si j'ai cessé d'exister pour eux aussi. (AYUMI) |
Ueno Park de Antoine Dole
Quand grand-père est décédé, j’ai compris ce qu’il avait voulu dire toutes ces fois et l’importance de ces moments passés ensemble, à contempler l’éphémère. C’est à cet endroit de nos cœurs qu’il continue d’être présent au monde. Grand-père aussi aurait eu honte de moi s’il avait été là. Ce n’est pas ce qu’il aurait voulu que je devienne, pas ce qu’il imaginait, sans doute. Je ne m’autorise pas souvent à penser à lui. Mais je sais que ce matin, il est à mes côtés. (AYUMI) |
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«Tu dois regarder l’arbre en entier et pas juste la fleur.» Grand-père disait qu’il fallait écouter toutes les fleurs, ensemble, pour que tous leurs murmures, bout à bout, laissent entendre leur secret. Ces fleurs aux âmes passagères, qui naissaient de nos souhaits avant de se flétrir, nous racontaient la vie. Lumineuse et belle un matin, mais si délicate qu’elle est prête à s’éteindre le soir venu. Une averse et c’était terminé, il ne restait plus rien. Un coup de vent trop fort et les pétales disparaissaient, emportés à travers la ville. Une main maladroite, brusque et sans retenue, et la branche pleurait les disparus. Et nous ne pouvions rien faire pour empêcher cela. Juste l’accepter, nous remplir de l’instant tant que cela était possible. Nous étions la fleur, nous étions la branche. «Contemple les fleurs, ma petite Ayumi, me répétait-il chaque fois que je tournais la tête vers les touristes. Elles ne seront bientôt plus là. C’est ce moment que tu dois saisir». (AYUMI) |
Ueno Park de Antoine Dole
Sans détonation. Sans surprise. Sans vie. Sans eux. Je suis restée dans ma chambre, incapable de bouger. Pour quoi faire? Et pour dire quoi? J’avais souhaité si fort que ce monde disparaisse et c’était arrivé. J’avais cessé de le faire exister. (AYUMI) |
Ueno Park de Antoine Dole
Je venais d'accepter de disparaître. Dans mes doutes, mes peurs. Dans mes craintes et mes angoisses. Quand on se trouve dans l’œil de ce cyclone, on n'en perçoit plus rien. On se tient juste debout à l'endroit où plus rien n'existe. Ni envie, ni désir, ni projet, ni souhait. On n'est plus rien, en vérité. (AYUMI) |
Ueno Park de Antoine Dole
J’avais fait ce que l’on attendait de moi, obtenu les meilleurs résultats de ma classe. Et pourtant, je n’avais rien. Tous mes efforts m’avaient finalement conduite ici, à la frontière d’une vie où tout était simple pour les autres et tout était laborieux pour moi. Il était encore tôt, mais l’obscurité était tombée sur la ville comme pour l’avaler. Et j’ai souhaité, au fond de moi, qu’il ne reste plus rien de cette vie une fois les ombres du dehors dissipées. Ce monde devait disparaître. (AYUMI) |
Ueno Park de Antoine Dole
Depuis combien de temps n’avais-je pas souri comme elles? Je n’avais pas d’amis avec qui partager une quelconque plaisanterie, j'avais toujours considéré les autres comme des concurrents, des notes à dépasser. Je n'existais pour personne. (AYUMI) |
Ueno Park de Antoine Dole
J’avais eu la note maximum à mon examen. Toutes ces nuits sans dormir, ces heures à réviser, cette solitude immense étaient là, sous mes yeux. Je n’ai pas quitté les chiffres du regard pendant plusieurs stations. Tout ce que j’étais, tout ce qui me constituait tenait là, sur une minuscule ligne. Je ne ressentais rien. Ni fierté, ni satisfaction. Je savais que mes parents en attendraient encore plus après ça. Que jamais je n’en ferais assez. Je n’étais plus qu’une sensation de vide, tout ce dont j’étais capable était là devant moi et je ne serais plus rien au-delà. J’étais le plus possible, la finalité, l’aboutissement. J’en étais convaincue. Tout ce qui suivrait, je ne men sentais plus capable. C’est là que j’ai ressenti comme une fissure se propager en moi. D’abord un léger éclat sur le vernis de mon existence. Puis finalement, ça s’est étendu d’un bout à l’autre de ma vie. Cet uniforme, cette coiffure, et jusqu’à ma façon de me tenir droite en permanence. Je ne savais plus qui j’étais. (AYUMI) + Leer más |
¿En quién se inspiró Bram Stoker para crear su personaje?