Una sirena en París de Mathias Malzieu
Depuis toujours il voyait ce qu’il croyait, plutôt que de croire ce qu’il voyait.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Depuis toujours il voyait ce qu’il croyait, plutôt que de croire ce qu’il voyait.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Un retour de joie surgit. Elle enfla, la joie, pulvérisa la souffrance en un souffle terrible et doux. Une tornade de réconfort l’envahit au contact de cette idée tellement plus grande que lui: Lula était sauvée. Il s’était sauvé dans le même mouvement. Il n’avait jamais été aussi intensément vivant qu’à cet instant où la vie le quittait.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
La regardant disparaître, Gaspard hurlait en silence. Il ne se ferait jamais à l’idée de l’avoir perdue, ni de l’avoir gagnée. Pas même de l’avoir connue.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Quelques secondes avant, elle était là. La sirène. La fille. La femme. Celle qu’il avait plus aimée en trois jours qu’en trois vies. Et l’écume qui continuait à jouer son rôle d’écume comme si de rien n’était. Le clapot délicat et les choses de vent.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
(…) elle le fixa une dernière fois. Des trains à vapeur traversaient le coeur de Gaspard. Ils sifflaient, se cognaient les uns aux autres. Tout prenait feu au ralenti. L’océan se renversait dans le ciel. Le grand tournis des étoiles, en plein jour.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Alors, Lula se mit à chanter. Un opéra d’écume, accordé avec le vent. Les vagues fouettaient son visage.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Alors, ils s’embrassèrent et ce fut un baiser impossible à arrêter. L’un comme l’autre le savaient, lorsqu’il prendrait fin, ils se sépareraient pour de bon. Ils s’entredévoraient délicatement. Le baiser prit fin. Le temps semblait s’être arrêté. Mais inéluctablement, il avançait. Gaspard ne parvenait toujours pas à s’y résoudre, ses yeux plantés dans ceux de sa sirène. |
Una sirena en París de Mathias Malzieu
S’il avait pu s’arracher le cœur et le couper avec un couteau à pain pour en offrir la moitié à Lula et qu’ils restent ensemble, il l’aurait fait. Son esprit fou cherchait une solution dans les arcanes de l’impossible, une autre solution que celle de l’implacable océan.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
–Ça pique. (…) Cette déclaration d’amour qui aurait dû lui donner le coup de grâce le remplit au contraire d’une énergie neuve. –Ça pique très fort… |
Una sirena en París de Mathias Malzieu
Lui l’insomniaque qui s’endormait dès qu’il devait assister à une messe, lui qui ne croyait qu’au potentiel poétique des histoires, peu importe que les héros aient existé ou non, il priait. Il ne savait pas quoi ni qui prier, mais il priait. Il exhortait l’Invisible à ne pas laisser tomber Lula.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Il était temps d’assumer concrètement ses rêves. Les vivre, ici et maintenant, et répondre à la question du panache. Se surprendre, se suspendre au plus-que-présent. Retrouver l’équilibre funambule entre le futur et le passé. Arracher chaque seconde à l’éternité pour devenir suprêmement Surprisier. Devenir un arrêteur de temps. Transformer la réalité, du moins la sienne, au contact du rêve.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Trop de temps passé à douter, à se fermer à la vie. La protection à l’excès ne lui ressemblait pas, il dormait mal dans son armure.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Lorsqu’il aimait quelqu’un, Gaspard faisait des crises de dons. Il pouvait se ruiner pour faire une surprise. Un effet secondaire de sa capacité à ressentir la joie plus fort que les autres. Son esprit fonctionnait comme le brûleur d’une montgolfière, il carburait à l’enthousiasme. Son cœur enflait, ses pieds décollaient du sol. Gaspard avait la faculté de se projeter haut et vite, au-dessus des nuages.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Quand il était petit, Gaspard rechignait à sortir de son lit, de peur d’oublier ses rêves. Sylvia lui racontait alors qu’un camion invisible passait chaque matin récupérer les rêves oubliés. Il les recyclait pour entretenir une base de données accessible à n’importe quel être humain, à n’importe quel moment de la journée. Il suffisait d’utiliser son imagination.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Tout l’amour qu’elle venait de découvrir, tout ce qui remplissait son cœur, elle donna tout.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Tout palpitait en lui, il aurait pu s’arracher le cœur pour le loger directement au creux de la poitrine de Lula. Elle l’aurait accepté, se serait arraché le sien et lui aurait rendu la pareille. Leurs lèvres entrèrent en collision, comme s’ils s’offraient chacun un bouquet de feux d’artifice. À la fin du baiser, Lula ouvrit les yeux et Gaspard était incapable de les fermer. Il venait de perdre connaissance.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Il déchiffrait la géographie de son corps. Tout était montagne, tout était cours d’eau. Une cascade, un volcan de nacre. Sa peau était plus douce que la plus douce des soies. L’eau qui entrait dans ses poumons n’éteignait pas l’intensité de son désir. Pire, elle l’accentuait.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Sa maladresse se transformait en grâce. Il s’agissait presque d’une nouvelle créature. Elle ondulait, tournait sur elle-même. À la surface, Gaspard était pris de vertiges. Il sentit qu’il n’était plus à sa place. La joie se mêlait à la mélancolie. La surface de l’eau était le miroir de ce qui les séparait.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
De son côté, Lula avait l'impression d'avoir attrapé une sorte de grippe magique. Elle découvrait de nouveaux symptômes. Une envie de manger la bouche de quelqu'un d'autre sans le mordre, l'envie de chanter sans tuer. Des fourmis le long de la nageoire et des crises de sourires bloqués. Une forme de doute la gagnait, le plus agréable des doutes. Ses écailles clignotaient comme la guirlande d'un Noël fêté dans l'espace. Sa machine à fabriquer l'amour se retournait contre elle mais cela ne la tuait en rien. Au contraire, Lula se sentait vivre et vibrer de toute part. Elle devenait la corde d'un instrument qui changeait de tonalité. Elle se transformait. Les polarités s'inversaient, elle avait chaud et froid dans le désordre.
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Una sirena en París de Mathias Malzieu
Leurs bouches n’étaient plus séparées que par l’épaisseur de deux harmonicas. Jamais leurs lèvres ne se touchèrent, mais musicalement, ils s’embrassaient. |
La edad de la inocencia